SLOW FASHION en réaction à la FAST FASHION
On oppose souvent la SLOW FASHION à la FAST FASHION
Le rythme effréné de l’industrie textile est devenu une course infernale…
Les grandes chaînes de magasins proposent désormais jusqu’à 8 collections annuelles sans compter les mini-collections appelées “capsules” et les collaborations en éditions limitées. Pour développer les marques, le but est de provoquer chez les acheteurs une addiction à la nouveauté, mais il est entretenu de façon totalement excessive, déstabilisant toute la filière textile en accélérant les rythmes de fabrication et ceux de la création.
Nous sommes rentrés dans l’ère du vêtement « kleenex » que l’on porte deux ou trois fois avant d’être jeté ou entassé au fond d’un placard. C’est ce que l’on appelle la FAST FASHION , c’est une mode non durable au style éphémère souvent dénuée de qualité
► UN PEU D’HISTOIRE POUR MIEUX COMPRENDRE…
Autrefois les marques de Haute Couture sortaient une collection pour l’automne-hiver et une collection pour le printemps-été. Yves saint Laurent par exemple , à ses débuts, s’isolait ainsi deux fois par an à Marrakech dans sa villa Majorelle pour dessiner des centaines de croquis .
En parallèle depuis les années 20, il existait aussi des collections appelées “les collections croisières” pour satisfaire les riches clientes américaines qui partaient en croisière l’hiver. Ces collections étaient celles qui restaient le plus longtemps en boutique.
Dans les ANNÉES 50, le calendrier de la mode parisienne était axé sur 2 collections saisonnières. Elles étaient présentées à grand bruit à la presse mondiale qui accourait dans la capitale pour connaitre fébrilement le diktat des Couturiers concernant la longueur des ourlets , des lignes, des tissus et des accessoires. Les règles de confidentialité étaient alors très strictes, il était interdit de réaliser le moindre croquis durant les défilés, les photographes ne devaient dévoiler leurs clichés qu’aux dates imposées par la puissante Chambre Syndicale de la Haute Couture. Les années 50 restent l’âge d’or de la Haute Couture, rappelons qu’ à l’époque il y avait encore une cinquantaine de maisons de Haute Couture.
Puis, ce fut au début des ANNÉES 60 la révolution du “prêt-à-porter” que l’on appelait autrefois “la confection”. Cette révolution permettait de démocratiser la mode et de répondre à une jeunesse qui avait soif de liberté. La société était en pleine mutation, c’est la décennie de toutes les audaces. La femme s’émancipe alors et son corps adopte une nouvelle silhouette comme la mini jupe.
Le concept révolutionnaire du “ready to wear” importé des Etats Unis bouleversa la mode . Sous l’impulsion de Pierre Cardin et contre l’avis de la Chambre Syndicale de la Haute Couture plusieurs couturiers créèrent des lignes secondaires, appelées “lignes de diffusion”, plus abordables et vendues dans les grands magasins et certaines boutiques. Cardin inventa et développa au maximum le système des “licences”, apposant son nom, moyennant des “royalties”, sur une multitude d’objets fabriqués sous contrat par des industriels du monde entier .
Mais l’influence de la couture parisienne déclina tout au long des années 60 car Londres surnommée le “swinging London” devint la grande rivale. La jeunesse anglaise décomplexée, était alors adepte de “la culture pop” qui consacrait l’émancipation de la femme.
Les ANNÉES 70 furent marquées par l’esprit bohème “Peace and Love”, mais aussi par des revendications pour la liberté des mœurs, pour l’avortement et également des revendications pacifistes contre la guerre du Vietnam. Les femmes se politisent, descendent dans la rue et leur look reflète aussi leurs combats.
La fin des “seventies” voient aussi l’émergence du mouvement punk revendiqué par les Sex Pistols ou David Bowie. Sous l’impulsion de l’excentrique Vivienne Westwood, les jeans se déchirent, l’imprimé écossais se dévergonde, les tee-shirts imprimés arborent les textes frondeurs des groupes de “rock alternatif”. Le premier choc pétrolier a lieu en octobre 1973 et le deuxième en 1979, mettant fin aux 30 années glorieuses de forte croissance.
Les ANNÉES 80 sont inspirées par la musique de l’époque, c’est l’ émergence de nouveaux stylistes appelés désormais “créateurs” comme Thierry Mugler, Claude Montana, Popy Moreni, Anne Marie Berreta et le petit jeune Jean Paul Gaultier. Couleurs flashy, fluo, paillettes, caleçons et body avec l’avènement du sportswear , silhouettes en X c’est-à-dire des épaules très larges , le look «working-woman» fait alors fureur. Plus underground le punk laisse place au style “rock gothique” et même au “gothique chic”.
Mais la grande révolution est l’arrivée des créateurs japonais. Leur radicalité Anti-Fashion s’illustre dans des formes, des couleurs, des manières différentes de travailler le tissu : disproportion, déconstruction, les vêtements perdent leurs formes traditionnelles . Leur devise est “less is more” , ils imposent la couleur noire à toute une génération. Les chefs de file de ce mouvement se nomment Yohji Yamamoto et Rei Kawakubo avec la marque “comme des garçons”.
Les « Six d’Anvers » constituent un groupe de jeunes couturiers Belges dans les années 80 qui s’imposent très vite dans le mouvement Anti-Fashion. C’est grâce à ces innovateurs que la mode belge sera renommée avec comme chef de file Martin Margiela. Leurs créations incarnent matériellement une volonté de « non-paraître ».
Les ANNÉES 90 marquent plutôt un désenchantement de la mode des créateurs qui devient conceptualiste, minimaliste, avec un rejet du matérialisme des années 1980. Les défilés proposent des silhouettes dénuées d’âme, dans une atmosphère de chaos post nucléaire, l’ambiance est « no future » , slogan repris aux punks des années 70 .
Pendant ce temps les géants mondiaux du textile industriel s’activent sur tous les continents et prennent le pouvoir … c’est le début de la “FAST FASHION”
La délocalisation des industries du vêtement date des années 70, puis s’est amplifiée dans les années 80, dans le but de revendre leur production sur les marchés européens, américains et japonais. Mais dans les années 90 la mondialisation engendre des géants de l’industrie textile appelés “MASS FASHION” . On croit alors aux bienfaits de la démocratisation de la mode. Ces enseignes emploient des bataillons de stylistes qui s’inspirent des collections de vrais créateurs qu’ils réinterprètent ( pour ne pas dire copient) quelques jours seulement après leur présentation lors des Fashion weeks.
Depuis la crise de 2007 le phénomène de “FAST FASHION” s’amplifie car la donne a changé pour les poids lourds de l’industrie textile. Se diversifier à l’international est devenu une urgence, parfois même une question de survie car la croissance de leurs ventes sur leur marché d’origine ralentit, quand elle n’est pas négative. C’est une course infernale : H&M, Zara, Gap , Uniqlo ont ouvert des boutiques par centaines à l’international sur tous les continents : Asie , Australie , Mexique, Afrique du sud. Les salaires de la main d’oeuvre ayant augmentés en Chine, les enseignes font alors fabriquer les collections dans des ateliers vétustes au Bangladesh , Vietnam ou en Indonésie en faisant toujours pression sur les prix et les conditions de travail grâce à des intermédiaires peu scrupuleux.
► LES LIMITES ET LES DANGERS DE LA “FAST FASHION”
Ces marques dont la réussite industrielle et commerciale est spectaculaire (Amancio Ortega le patron espagnol de Zara a démarré avec petite boutique en 1975) ont contribué à cette frénésie, rendant ainsi les jeunes générations “addict” aux nouveautés. Trois semaines séparent le début de la fabrication et l’arrivée du réassort dans une boutique de ces géants de la distribution, le rythme est infernal et épuise jusqu’aux créatifs ! Une collection est proposée tous les quinze jours pour assouvir l’envie de nouveauté, ainsi que des éditions limitées, et des collections appelées “capsule” (mini-collection hors collection, généralement signée par un créateur extérieur à la marque et en série limitée) . Les tendances d’une saison sont ainsi égrainées en mini-collections mensuelles perpétuelles.
La “FAST FASHION” est désormais en surchauffe entraînant une saturation, un écœurement avec des effets pervers sur toute la filière textile : consumérisme à outrance, boulimie créant une aliénation, une uniformisation, avec des impacts négatifs sur l’environnement et sur les conditions de travail de la main d’oeuvre étrangère. Le drame du Rena Plazza qui fit plus de 2000 morts en 2013 dans des ateliers textiles vétustes de la capitale du Bangladesh a provoqué une prise de conscience mondiale.
⇒ Lire notre rubrique sur la MODE ÉTHIQUE
Les marques de luxe
Les marques de Luxe, elles aussi ne sont pas épargnées. Les collections “croisière” relancées par Lagerfeld chez Chanel sont devenues de véritables collections à part entière. Il y a maintenant des “Resort” ou encore “Pre-Spring”, “pre-Fall”. Les “department stores” influents des pays en demande de luxe : USA, Moyen-Orient, Brésil, Asie ont fait pression auprès des grandes marques afin de booster la consommation durant les périodes creuses où l’intérêt pour les collections hiver décline.
Afin de séduire une clientèle fortunée, les grandes maisons et marques de Luxe ont donc créé de nouveaux événements stylistiques et médiatiques, aussi courus que les traditionnelles Fashion Weeks par la presse, les clientes et les acheteurs internationaux. Ce nouveau chiffre d’affaire ainsi généré à l’exportation est devenu stratégique pour les griffes de luxe.
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► SLOW FASHION : ACHETER MOINS, MAIS MIEUX ET ÉTHIQUE:
La SLOW FASHION privilégie la qualité à la quantité tandis que la FAST FASHION , adepte de la mode jetable fait exactement l’inverse !
La vision des consommateurs sur le “Fashion system” est en train de changer radicalement. La pression des jeunes générations Y et Millenium concernant le respect des valeurs humaines et environnementales est importante. Ils demandent des vêtements et accessoires de bonne qualité, ayant une véritable identité, fabriqués dans des meilleures conditions, pensés pour durer puis recyclés. (tous plébiscitent la mode vintage et privilégient aussi les productions locales et l’artisanat ). Ils sont prêts à consommer un peu moins, payer parfois même un plus cher pour des produits entièrement traçables depuis les matières premières, jusqu’aux techniques de production et d’approvisionnement qui doivent être respectueuses de l’environnement.
Consommer SLOW FASHION c’est:
- en finir avec les achats “coup de cœur “, les soldes boulimiques, les vêtements «kleenex», portés seulement deux ou trois fois restant parfois des années au fond du placard ou bien jetés sans tri au milieu des ordures ménagères.
- se rappeler qu’il existe des êtres humains derrière les machines et que des ressources environnementales diminuent et que les conséquences des modes de production du secteur textile peuvent être néfastes pour la planète.
- réfléchir au moment où l’on achète, donner un sens à notre acte d’achat, on parle de “clothing-re-connection »
Les collections sont conçues juste pour une saison, standardisées, donnant l’impression de clonage, c’est donc tout un logiciel de pensée qu’il faut revoir pour arriver à réapprendre à aimer nos vêtements, les faire durer, en prendre soin et savoir leur donner une seconde vie .
“Le Commerce Équitable est un partenariat commercial, fondé sur le dialogue, la transparence et le respect, dont l’objectif est de parvenir à une plus grande équité dans le commerce mondial. Il contribue au développement durable en offrant de meilleures conditions commerciales et en garantissant les droits des producteurs et des travailleurs marginalisés, tout particulièrement au Sud de la planète.”
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